Pour lutter contre le Covid-19, les organisations de protection civile du Jura-Nord vaudois, du Gros-de-Vaud et de Broye-Vully ont dû poser, dans l’urgence, les bases d’une collaboration inédite. Mais il restera quelque chose de l’expérience, souligne le commandant Sébastien Rüegg (ORPC Gros-de-Vaud)
Commandant, est-ce que le regroupement des trois régions dans un seul et même bataillon, le Bataillon NORD, allait de soi?
Sébastien Rüegg: Non, c’est bien sûr une opération très spéciale. Lors de la première vague, nous avons travaillé ensemble pour la toute première fois. Nous nous sommes découverts. Jusque-là, nous portions le même uniforme, nous dépendions de la même structure cantonale, mais nos fonctionnements, nos habitudes et nos personnalités étaient très différentes. Cela n’a pas été sans quelques tensions, et c’est normal lorsqu’il s’agit d’accorder diverses visions pour accomplir une même mission. Je remarque que les choses ont vite bien fonctionné, et que c’est même devenu très naturel avec la seconde vague. Plus personne ne s’arrête au badge que nous portons sur le bras droit.
La cohabitation des trois régions a-t-elle évolué entre les deux engagements?
Oui. Lors de la première vague, nous avons tout centralisé à Yverdon-les-Bains et nous nous sommes rendu compte que ce n’était pas l’idéal. Cette fois, la tête – c’est-à-dire le commandement – est à Orbe, mais il y a des bras armés dans chacune des trois régions. Tout ce qui relève de l’administratif est géré entre Orbe pour le Jura-Nord vaudois, Echallens pour le Gros-de-Vaud et Payerne pour Broye-Vully. C’est beaucoup plus efficace. Beaucoup plus compatible, aussi, avec notre système de milice.
En tant que commandant d’une région, vous avez dû renoncer à une partie de votre pouvoir de décision…
Il a été décidé que le Jura-Nord vaudois avait le lead et cela me va très bien. Les problèmes d’ego peuvent survenir à n’importe quel échelon hiérarchique, dès lors que des personnes de plusieurs régions différentes occupant la même fonction doivent s’organiser. Mais j’ai le sentiment que nous avons su dans l’ensemble regarder dans la même direction, au service de la mission, plutôt que de perdre de l’énergie dans ce genre de choses.
Y aura-t-il, pour chacune des régions partenaires, des enseignements à tirer de cette expérience?
Evidemment. De manière assez surprenante, nos fonctionnements sont très différents les uns des autres. Il y a donc forcément beaucoup de choses à apprendre en lorgnant comment travaillent les voisins. Nous avons également été confrontés à des problématiques inédites, comme celle de la gestion des sans-abri, dont nous n’avons pas trop l’habitude à la campagne.